Les collègues atypiques ou stéréotypés que j'ai pu croiser sur ma route cette année...
La
prof de lettres famélique qui mange à chaque repas du gruau (si, si !) dans un bol
en plastique, et qui arrose le tout d'une tisane sans goût et sans
calories. Cette collègue travaille à mi temps et, à chaque fois que je
l'entends parler, elle ne cherche qu'à travailler le moins possible, veut
faire sauter des cours, fait le décompte des jours et des heures (!)
avant les prochaines vacances...
Le prof d'histoire-géographie
qui parle dans un français recherché, n'utilise jamais "ça" mais bien
"cela", met toutes les négations, s'inquiète dès qu'il se sent entraîné
vers le "mal parler". Il avait pris un an pour cesser d'enseigner, et
s'est vu obligé de revenir. Il a de l'humour et énormément de culture.
Mais quand j'ai cours à côté de sa classe, je n'entends que des
hurlements d'animaux... Un héron dans la jungle amazonienne, quoi.
Le prof de lettres syndicaliste qui parle souvent
seul, s'adresse aux femmes comme à des poupées ("Dis-moi, la
blonde...") quand il daigne les considérer et porte systématiquement le
chapeau d'Indiana Jones pour venir en cours. Cet attirail est soutenu
par un joli gilet à poches de type reporter photo. Lui, il se présente
en dresseur en fin de carrière, avec un air suffisant de vieil acteur.
Ou de vieux beau. Mais l'a-t-il été ?
Le prof de microtechnique qui fait partie de ceux
dont le poste saute et lâche encore plus les vannes qu'habituellement.
Il se targue de tout savoir, a un avis sur tout, et parle bien fort
pour l'exposer au tout venant. D'origine roumaine, il n'a de cesse de
dire que tout allait bien mieux sous Ceaucescu. Ou encore, en montrant
une malette digne du KGB, que le bon cuir de l'Est, il n'y avait que ça
de vrai. Dans ses lubies, nous avons eu droit dernièrement à la théorie
du complot tibétain, qui affabule totalement : il n'y a eu aucun
massacre de la part de la Chine ni rien de totalitaire (comme sous
Ceaucescu, évidemment). Le plus dur, avec ce collègue, c'est de ronger
son frein et de se mordre les lèvres plutôt que de lui répondre.
Le prof de technique qui porte des chemises de
bûcheron aux carreaux rouges et noirs. Il a aussi un catogan
proéminent. Lui, c'est le faux syndicaliste. Prêt à râler, mais jamais
là aux réunions, jamais là quand il faut l'ouvrir devant "les chefs".
Il a aussi tendance à commenter toutes ses actions car le silence
l'insupporte, surtout quand une ou deux personnes sont seulement dans
la salle des profs et se taisent : "Tiens, je vais regarder si quelque
chose dans mon casier... Ah ben non, y'a rien. Bon, je vais prendre un
café. Sans sucre." Etc. On aurait presque envie d'être vulgaire et de lui asséner un "Ta g..... !", histoire de lui montrer ce que ça donne, quelqu'un de franc.
La prof de math à la voix de crécelle qui squatte la salle des ordinateurs tout le temps. A croire qu'elle ne fait jamais cours. Elle a toujours la même place dans cette salle, utilise le même PC, pour la même chose : ses recherches généalogiques. Elle consulte tout ce qui existe sur le net, et imprime tout ce qui l'intéresse. Je suppose que depuis le début de l'année, elle en est à plusieurs centaines de pages. Et comme elle est un formidable boute-en-train, elle a aussi imprimé -puis affiché- le portrait du prochain proviseur, avec ses recettes préférées...
Je poursuivrai sans doute cette galerie de portraits. Mais pour ce soir, ça sera tout ! Nan mèho !