Jour 5 / St Alban / 35.574 pas / 20km
Du Villeret à St Alban, le chemin est relativement plat. Relativement. Il a plu pas mal dans la plaine en arrivant sur le Sauvage. Trempée, j'ai pris un thé pour ma réchauffer dans ce refuge. En repartant, il peluvait un peu moins. Nous avons marché à quatre, ce qui était sympathique mais sur la fin de l'étape, j'ai trouvé cela presque pesant : mes compagnons s'arrêtaient sans cesse pour faire des pauses, prendre des photos, manger, boire, papoter... C'est bien dans une certaine limite : le rythme de marche est systématiquement "cassé".
Nous avons déjeuné dans un refuge de l'église St Roch, qui était fort jolie. Une dame semblait nous attendre pour tamponner nos créanciales.
En arrivant sur St Alban, nous avons été déçus : le village ne se découvre pas peu à peu, comme les autres. Nous tombons dans une zone assez déserte, où les hôpitaux psychiatriques, les services gérontologie se succèdent. Le village est très gris. Heureusement, le gîte était au bout de la pente que nous avons descendue. Il était temps d'arriver. Il s'agissait d'un gîte "solidaire". Je craignais un peu le côté anarchiste, engagé, altermondialiste "à fond" mais le couple qui tenait ce lieu était mesuré et fort sympathique. Le confort était rudimentaire dans les chambres, et le repas très sympa. Nous avons eu quelques instants de silence avant de dîner, pour penser à ceux que nous aimons ou que nous détestons. J'ai aimé cette idée.
J'ai partagé une chambre avec M., étudiante en médecine (qui a crû à son tour que j'avais une vingtaine d'années...). C'est avec elle que je vais marcher les jours suivants, et je recroiserai aussi deux couples du sud, simples et généreux. Je laisserai les autres marcher ensemble : ils ne pouvaient plus se séparer, ce qui me semblait un peu contraire à l'idée que je me faisais du chemin.
Mon tampon de créanciale a été mis par une petite dame sans âge, chez elle. J'avais même le choix entre trois tampons.
Pendant le petit-déjeuner, le lendemain, j'ai vu que des roses trémières entouraient les fenêtres du gîte.
Lors de cette étape, quelque chose s'est passé : j'ai pris du plaisir à avancer, à marcher, à me dépouiller d'une façon plus immatérielle qu'en m'allégeant le sac. Je pensais que Flûtine aurait aimé me voir avancer d'un bon pas, à une certaine cadence, en oubliant presque la douleur au tendon d'Achille. Je me suis sentie forte, à ce moment-là. Et je n'avais pas envie d'arrêter le chemin.