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Prof et plus si affinités

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Prof et plus si affinités
6 octobre 2009

Je lisse ma moustache

fausse_moustache

Je sais bien que vous n'êtes pas fébriles devant vos écrans en attendant de mes nouvelles, mais je pense qu'il est nécessaire de faire un petit bilan de la journée.
Ce matin, en arrivant, maux de ventre, je dois l'admettre. C'est bête, je le sais, pourtant ne rien avoir reçu du proviseur hier m'inquiétait. Arrivée au lycée, j'ai pu constater que je n'avais rien non plus dans mon casier. Super rassurant. Moi qui étais à peu près claire dans ma démarche dimanche, je me retrouvai fort dépourvue devant un tel vide.
Heureusement, mes collègues étaient là, quoique rares en ce mardi matin.
Je suis passée voir le CPE, qui avait appris presque par hasard l'affaire hier, en consultant ses mails... Hum. Il m'a soutenue et a décidé de passer voir les STG deux heures après, juste avant que je fasse mon cours. Savon et compagnie, devant un adjoint transparent, inodore, insonore. Les STG étaient égaux à eux-mêmes, inébranlables. Ils pensaient apparemment que je ne ferais pas cours aujourd'hui. Je les ai refroidis avec mon "Voltaire, chapitre III, vous sortez votre cours. Et si vous n'avez pas vos affaires, une feuille et de quoi écrire." Certains trainaient des pieds pour s'y mettre. Ils ont été déçus de me voir aussi gaillarde, je crois.

D'autant que j'ai fait mon petit laïus du type : "Je tenais à remercier les coupables. J'ai eu de jolis témoignages d'amitié, une bouquet de fleurs, des mails ce week-end... C'était un mal pour un bien, vraiment." Les STG ont feint l'indifférence, les ES se sont amusés de ma boutade -pourtant sincère. L'humour est vraiment ma meilleure arme, surtout en situation de conflit.

Sinon, toujours aucun coupable en vue (personne ne veut se dénoncer) et je crois que l'enquête stagne. Quoi qu'il en soit, les élèves ont vu que je ne lâcherai rien et que l'on continuerait notre travail en vue du Bac.

Bon, j'ai beau fanfaronner, tout cela m'a fatiguée. Alors j'ai décidé de ne pas corriger de copies ce soir. Je serai tranquillou devant les Desperate housewifes comme chaque mardi, peut-être avec un panaché.

Pour vous faire sourire, sachez que j'ai envisagé des commentaires sur les copies du type : "vous êtes rasoir/barbant, là" ou "vous avez un poil dans la main", ou encore "votre remarque est poilante". Et puis comme j'ai réussi à me faire saigner de la lèvre supérieure nerveusement depuis samedi, si l'un des élèves m'avait chambrée là-dessus, j'aurais évidemment répondu que je m'étais mal rasée ce matin... ;-)

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5 octobre 2009

Faut-y que j'sois solide !

violence__cole


Outre le fait que j'ai passé une journée de repos assez nulle en soi (soucis administratifs au pays des shadocks de l'immobilier), je pensais naïvement trouver en rentrant un message au moins du lycée afin de savoir où nous en étions et comment agir demain.
Mais rien. Nada. Queutchi. Niet.
Super facile à gérer, vraiment.

4 octobre 2009

Florilège

Snapshot_20091004

J'ai parlé presque deux heures avec une collègue de lettres au téléphone ce matin, et cela m'a fait du bien. J'ai un peu dédramatisé, pour pouvoir reprendre les classes mardi. Ma collègue a été très franche avec moi, et j'ai eu droit à des compliments que je n'avais  jamais entendus jusque-là à mon égard.

Sinon, je laisse l'administration gérer le problème et l'enquête. En attendant, je reprends mes cours car je ne veux pas sanctionner les élèves sympa et bosseurs. N'oublions pas une chose : nous ne sommes que début octobre, et j'ai encore sept mois à passer avec mes élèves. Je ne veux pas que tout soit gâché à cause deux ou trois élèves en mal (mâle ?) de reconnaissance.
Par ailleurs, le proviseur m'a fait un mail à l'instant et va agir demain. Il dit la situation "intolérable et inacceptable". Sans doute aussi parce qu'il a su que j'étais soutenue par les délégués du personnel... Mais peu importe : le message aux élèves sera d'autant plus fort : je suis soutenue par tout le monde, et toc.

Du coup, j'ai décidé de faire mardi quelque chose qui va dérouter les coupables : en rire et les remercier, puisque cela m'a permis d'avoir un bouquet de fleurs, ainsi que des témoignages d'amitié touchants.

Les surprendre est encore ma meilleure arme, surtout par le rire et l'ironie. Les autres -la majorité-, ceux qui condamnent l'acte en silence, me suivront. J'ai d'ailleurs appris que certains adoraient mes cours ! Par quoi ne faut-il pas passer pour avoir des bouquets de fleurs et/ou de compliments !

3 octobre 2009

Dilemme

Z'êtes zentils, tous, de répondre à mon histoire barbante de rasoirs !

 

croquettes_chaton

Pendant que je faisais 45mn de queue chez Karouf (je hais les supermarchés le samedi, mais je n'avais vraiment pas le choix pour cette fois), Ipod new-yorkais sur les zoreilles (envie de Z ce soir, cela pose un problème à quelqu'un ?), je me disais que je pouvais adopter deux positions face à tout cela :

  • soit jouer l'indifférence, prendre ça de haut et avec mépris, pour tuer leur goujaterie dans l'oeuf, en prenant le risque qu'ils recommencent dans une autre gamme car ils n'auront pas été sanctionnés pour ce qu'ils ont fait;
  • soit laisser mes collègues aller en délégation lundi comme prévu, car ils veulent monter au créneau, et faire des activités bêtes et méchantes en cours tant que rien ne sera résolu. Souci : la proviseur a menacé de convoquer les parents -que je risque de me mettre à dos-, et l'action de mes collègues risque peut-être aussi de me mettre sur la liste rouge clignotante du proviseur...

Sachant que tout au plus quatre élèves sont concernés sur les deux classes, je ne sais de quel côté faire pencher la balance. D'ailleurs, vos opinions sont très partagées sur la question, et me prouvent qu'il n'est pas évident de trancher.

Bon, je vais peut-être enfin dîner. La prochaine fois que j'aurai besoin de courses un samedi, j'opterai pour manger les croquettes des chats plutôt que d'aller chez Karouf. Mais je suis quand même contente : j'ai acheté mes premiers pomelos chinois. J'adore ça !

 

pomelos_chinois

3 octobre 2009

Les Experts Paris

Par quoi commencer ? Mon état de fatigue morale et ma déception, peut-être. Ou encore ma naïveté. Ou plutôt les faits. Oui, les faits, car sinon vous ne comprendrez rien...

Hier, outre le fait qu’une partie de la STG se faisait insolente de façon exceptionnelle durant mon heure de cours en classe entière, un petit paquet a émergé de nulle part vers 15h40. Une élève me l’a signalé, en m’annonçant qu’on lui avait envoyé quelque chose.

Le paquet se trouvait par terre, entre la rangée de droite et celle du milieu, face à moi. Une seconde élève l’a ramassé, et a lu qu’il m’était destiné. Elle a suggéré de le jeter, ce à quoi j’ai rétorqué que je voulais le récupérer. J’ai entendu quelqu’un dire «Si c’est un cadeau pour Mme Virgibri, il faut lui donner ».

J'ai eu la présence d'esprit de ne pas ouvrir le paquet, l’ai posé sur mon bureau, et j’ai tenté de finir le cours. Ils étaient très agités, et je ne voulais trop m’attarder sur cet envoi, d’autant qu’étant de face, je n’ai rien vu voler : cela signifie donc que le paquet est passé entre plusieurs mains avant d’atterrir par terre. J’ai eu ensuite une légère altercation avec le Mou de la classe, et d’autres élèves m’ont alpaguée sur la méthodologie du commentaire composé de façon assez agressive.

Ceci étant, le cours s’est terminé cahin caha, avec d'autres prises de bec plus ou moins marquées. Je suis descendue en salle des professeurs. Une fois là, j’ai ouvert le dit « paquet cadeau » mentionné précédemment, devant deux collègues de lettres. Elles ont été aussi atterrées et choquées que moi-même : le paquet, scotché consciencieusement, contenait deux rasoirs jetables neufs, eux-mêmes scotchés à la feuille. Sur celle-ci, un « mode d’emploi » pour utiliser les rasoirs était écrit en capitales d’imprimerie, avec nombre de fautes d’orthographe, au stylo à bille bleu clair.

Le caractère insultant des propos ne me paraît pas être le plus grave : c’est la préméditation et la volonté d’intimidation que je trouve fort inquiétantes –à mon égard, et en règle générale.

Le paquet avait été préparé à l’avance, les rasoirs ont été achetés dans ce but, tout a été calculé pour que cet événement arrive un vendredi soir, en fin de cours, alors que la classe avait fini sa semaine et ne me revoit que le mardi suivant en demi groupe. La symbolique du rasoir est aussi très dérangeante, à mon sens. Ce n’est pas n’importe quel objet qui a été glissé là.

rasoirs_bic

 

Ceci étant, je suis allée voir le proviseur et l'adjoint illico, sous le choc mais n'ayant pas encore bien réalisé les faits. Le comble, c'est qu'à un moment donné, la proviseur m'a renvoyée dans la ligne des trente mètres, comme si mes interrogations étaient illégitimes. Je suis restée très calme mais ferme, et n'ai pas démordu quant à la gravité du geste. En face de moi, aucune réaction quelconque de sollicitude ou d'empathie. Pas une fois on ne m'a demandé si j'allais bien. Bilan : un rapport à faire, chercher à reconnaître les écritures, et on se croise demain. Hop-là, emballé c'est pesé.
Un peu abasourdie et les jambes en coton, j'ai redescendu les étages pour repasser par la salle des profs. Mes collègues m'attendaient et culpabilisaient de ne pas m'avoir accompagnée. Là, je me suis sentie moins seule, et c'était une première depuis quelques années -mes années TZR, quoi.
Ce matin, donc, j'ai croisé le chef qui m'a gratifiée d'un "J'ai bien reçu votre rapport" et nous a laissés en plan dans la salle des profs, mes cernes et moi. 

Sonnerie de première heure. J'entre dans la salle de classe, j'installe mes affaires, les élèves de ES entrent. Comme je compte quelques retardaires, je sors quelques secondes dans le couloir, pour regarder qui arrive. De retour à mon bureau, stupeur : un rasoir jetable y trône, accompagné d'un mot scotché du même acabit qu'hier (sauf que là, on me suggérait de me raser de haut en bas, je cite).

J'ai envoyé un délégué chercher le proviseur. Celui-ci m'a d'abord dit de "faire un rapport". J'ai posé une question rhétorique du type : "Parce que là je dois leur faire cours comme si de rien n'était pendant deux heures ?" Il a hésité environ cinq secondes, et a dû prendre la mesure de la chose -enfin.

Il est entré, a annoncé que tant que rien ne serait démêlé, il n'y aurait pas de cours de ma part : les élèves ont donc planché sur un commentaire, que je leur destinais initialement en devoir maison.

Au bout d'une heure, le proviseur a demandé à voir les délégués. Ensuite, il est revenu à 9h45 pour savoir si nous avions une réponse et imposer un délai pour résoudre l'affaire. Entre temps, une collègue, choquée hier soir, m'a déposé un bouquet de fleurs en guise de soutien. J'ai trouvé cela adorable.
A midi, personne n'était venu se dénoncer ni témoigner en ES. Les élèves de STG n'ont pas cours le samedi, ce qui les arrange pour l'instant. Bilan du jour : des collègues extra, qui vont faire front lundi, exiger des résultats et une prise de conscience à l'administration (je précise que je n'ai rien demandé), des cernes un peu plus marqués, des suspicions qui vont m'enquiquiner un temps, de la déception, des remises en cause...

Je devais sortir cet aprèm pour faire réparer mon scooter, mais je sens bien fatiguée, là.

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2 octobre 2009

The bisounours are dead

Aujourd'hui, les STG m'ont fait un cadeau surprise. Du genre cadeau empoisonné, qui cherche à m'intimider et qui est menaçant. Je dois rédiger le rapport officiel ce soir.
Vous aurez plus de détails dès que je le pourrai.
Une chose me fait du bien, cependant : mes collègues me soutiennent, et cela m'est fondamental.

Edit de samedi, 13h30 : rebelote ce matin, avec une autre classe... Je me remets, je déjeune puis je raconterai...

1 octobre 2009

Tell me the truth...

v_rit__Ben


Au milieu des copies, quelque chose de fort mignon : "La vérité n'est pas toujours bonne à attendre."
On pourrait presque en faire un titre d'émission radio ou télé.

1 octobre 2009

Lenny & C°

Lenny_Kravitz

En tête depuis hier, car entendue en rentrant du lycée, cette chanson de Lenny Kravitz. Elle a des airs de Barry White, je trouve, et de Stevie Wonder.
Si j'étais attirée par les hommes, Lenny serait dans mon panthéon. Je l'ai vu une fois en concert, et punaise, il est impressionnant.
En fait, quand j'y pense, certains compagnons de Vanessa Paradis auraient été à mon goût : Johnny Deep est dans mes préférés...
La garce !

Johnny_Depp

29 septembre 2009

Si les profs se mettent à plaisanter, maintenant...

Quelques petits diamants de cours, qui me viennent à l'esprit et que je ne prends pas le temps de noter ici, malheureusement. Il ne s'agit pas d'erreurs mais de jolies choses, qui me font sourire dans mon quotidien...

* En seconde, sur une nouvelle assez triste de Danièle Sallenave de 1983, je m'attarde sur le début du texte, en demandant sur quoi l'auteur insiste. J'attends un anniversaire sans bougies, avec du mousseux, et sans famille... Je cherche avec eux les scenarii possibles parce qu'il n'y a pas de bougies. Soudain, l'orateur tyrannique de la classe lève la main, comme d'habitude.
_ Ouiiiiiiiiiii, La Pie ?
_ Ben, le texte est de 1983...
_ Et ?
_ Y'avait p'têtre pas de bougies en 83 !
_ Vous savez, La Pie, je m'éclaire depuis peu à l'électricité, et je trouve cela pas mal du tout ! En 83, je vivais dans une caverne.

bougies_anniversaire

* Aujourd'hui, je parle de la méthode du commentaire composé en STG. Je donne des indications supplémentaires, je cause, et j'utilise soudain le verbe "se pâmer". Je vois deux nénettes s'agiter. Je les interpelle gentiment.
_ Madame, comment vous faites pour parler... comme ça ?
_ ... (mimique étonnée de ma part)
_ Oui, comme ça, avec tous ces mots compliqués ! Ma prof l'an dernier elle parlait pas avec autant de mots !

Ben_mots

* En seconde, sur une nouvelle perturbante de Richard Matheson, "Journal d'un monstre", je parle du personnage, le décris, je bouscule les a priori des élèves avec mon air sérieux. Intervient dans l'histoire un petit animal, que le "monstre" va tuer sans le vouloir vraiment, en le serrant dans ses bras.
_ En gros, c'est comme Quasimodo, si vous voulez : il veut de l'amour, mais ce sont les autres qui le poussent à devenir mauvais. Là, le monstre voulait juste serrer dans ses bras le chien ou le chat. Cââââlin ! et paf, le chien !
Il faut m'imaginer dire le "cââââlin" sur un certain ton, forcément. Certaines élèves ont été prises d'un fou rire, que je ne pouvais réprimander... J'en étais à l'origine.

c_lin

* Cet après-midi, en TPE, un groupe m'interpelle :
_ Madame, on a besoin de vous !
_ Oh oui, encore , j'adore m'entendre dire ça !
_ Ben alors... Madame, on a besoin de vous !
_ Mmmm, oui ?

* En seconde, pendant que je commente mes choix de textes... "Certes, ce texte n'est pas drôle et ça fait froid dans le dos, cette histoire... D'ailleurs, on m'a dit que tout cela n'était pas d'une folle gaieté. C'est vrai ça, je vous choisis des textes tristes ! Va falloir que ça change !"

Hulk

Et j'en oublie sans doute beaucoup d'autres...

28 septembre 2009

Femmes, je vous aime (attention, cette entrée risque d'être fort longue...)

Il y a bien longtemps que je n'ai fait une entrée sur mes lectures... Celles que j'envisage, ou celles qui sont achevées. Et comme Ed a lancé une petite requête aux bloggeurs qui la lisent, je me lance ! (Même si je ne crois pas en une écriture féminine...)

Voici donc des lectures d'écrivains femmes qui m'ont marquées (NB : je déteste l'appellation nouvelle d'écrivaine ou de professeure, que vous ne verrez jamais sous ma plume). Mes choix vous paraitront souvent classiques, et je m'en excuse à l'avance...

duras_douleurDuras_mer__crite

La première qui me vienne à l'esprit, c'est Marguerite Duras. J'ai eu ma grande époque, depuis le lycée jusqu'à la fin de mes années d'études. Mes deux livres les plus marquants ont été La Douleur et L'Amant. Pour des raisons fort différentes, d'ailleurs. Le premier parce qu'il est la douleur sur papier, et que j'y ai découvert un aspect de sa vie que j'ignorais : la résistance, le lien fort avec celui qui allait devenir plus tard président de la République, son mari déporté... Le second, bien plus connu, pour sa sensualité, ce regard acéré sur l'existence, l'adolescence, la famille. Enfin, un dernier ouvrage m'a bouleversée : La Mer écrite. Il est paru juste après sa mort, que j'avais apprise alors que je passais un stage BAFA. J'étais la seule à être bouleversée, et peu connaissaient Duras. Ce petit livre est composé de photographies, commentées par Duras. C'est la quintessence de son art et de toutes ses années d'écriture, à mon sens. Un écriture sèche, humaine, désarçonnante.

Yourcenar_Anna_sororColette_pur_et_impur

Ensuite, j'hésite entre deux monuments de la littérature, qui m'ont toujours impressionnée fortement par leur intelligence -et le mot est faible. Il s'agit de Marguerite Yourcenar et de Colette.
Assez vite, vers quatorze ans, j'ai voulu lire la série des Claudine, sans trop savoir pourquoi. Enfin, si : Comtesse adorait Colette, je voulais donc à la fois comprendre pourquoi, et me rapprocher d'elle de cette façon, sans doute (la littérature a été toujours été pour moi un moyen de grande proximité intellectuelle avec ceux que j'aime). J'ignorais que j'allais tomber sur une écriture aussi magistrale, à la fois simple et ciselée comme les plus merveilleux cristaux de Bohême... J'ai vite arrêté les Claudine pour passer à d'autres oeuvres telles que La Chatte ou Le Pur et l'impur. Depuis, j'ai investi dans les volumes de la Pléiade, jamais ouverts : ils me font presque peur par leur beauté... Je dis toujours que si je pouvais avoir le dixième du vocabulaire de Colette, je serais ravie, par exemple.
Mais je crois que ce syndrome d'infériorité est encore pire avec Yourcenar. C'est l'une des intellectuelles qui me foudroie par son intelligence. Elle n'avait même pas besoin de parler : son regard brillait autant que son intellect. Son écriture me paraît souvent trop profonde; j'ai l'impression que quelque chose d'important m'échappe et que je ne suis pas capable de la comprendre... J'ai lu son autobiographie, dont la première phrase m'est restée en mémoire : "L'être que j'appelle moi vint au monde le 8 juin 1903..." Mais aussi Anna Soror et Feux. Je n'ai jamais dépassé quelques pages sur Les Mémoires d'Hadrien. J'ai en mémoire un entretien de Pivot avec Yourcenar, qui m'avait saisi et hypnotisée. J'aimerais beaucoup le revoir, d'ailleurs.

Lajja

Ensuite, même si l'écriture en soi n'est pas excellente, j'avais envie de mettre dans cette liste Taslima Nasreen, lue dans les années 90. Cet écrivain était condamné à mort dans son pays, le Bangladesh, pour avoir défendu le droit des femmes... Livrée à une fatwa systématique, elle s'est exilée dans de nombreux pays, dont la France. Son parcours m'intéressait et j'étais dans mes années de révolte. Du coup, C. m'avait offert son roman à sa sortie : Lajja.

Woolf_OrlandoBeauvoir_2_me_sexe

Pour finir, car il y a peu de femmes dans ma bibliothèque, mais c'est l'histoire de nos sociétés qui veut cela, je terminerai avec encore deux "classiques"  : Virginia Woolf et Simone de Beauvoir.
Woolf, je l'ai lue progressivement, à partir de la khâgne, je crois, ou un peu avant. Mon souvenir le plus net, c'est Orlando. Et Woolf, c'est comme Yourcenar : trop intelligent pour moi, je pense. J'aime pourtant sa perception du temps et de la solitude... Entre les actes m'avait laissée perplexe, et je crois me souvenir que Mrs Dalloway aussi.
Quant à Simone de Beauvoir, le coup de coeur est venu après celui pour Sartre (il semblerait que pour beaucoup de lecteurs ce soit le cas), alors que j'avais eu en cadeau pour mes dix-huit les Mémoires d'une jeune fille rangée, avec une superbe dédicace de mes professeurs d'espagnol et de dessin de terminale, époux à la ville et parents d'un ami. Je reviens à Beauvoir, sans doute avec l'âge et grâce à mes études. J'avais dû la lire trop jeune, sans doute. Et l'un de ses romans, L'Invitée, n'est quasiment plus lu aujourd'hui. Là, j'ai décidé de me plonger dans Le Deuxième sexe et de peut-être relire ses mémoires, avec la suite, La Force de l'âge.

Ce que je constate surtout dans cette liste réduite, c'est qu'il m'est fort difficile de scinder les oeuvres de la vie de ces auteurs. Je m'explique : je crois qu'elles me fascinent parce qu'elles ont des parcours qui me passionnent, parce que leur courage, leur foi en ce qu'elles faisaient est admirable, parce que j'aurais aimé avoir leur force, leur subtilité, aussi.

Si je reprends tous ces noms, il ne s'agit que d'intellectuelles engagées, qui ont lutté quelle que fusse leur époque, pour s'imposer dans leur art et vivre ce qu'elles avaient à vivre. Duras engagée politiquement, mais aussi pour le droit à l'avortement avec de Beauvoir (pensez au manifeste des 343 salopes); Nasreen avec l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête depuis des années; Colette qui divorce, pratique le mime, aime femmes et hommes, fume; Yourcenar, aussi discrète que possible, qui vit son histoire d'amour avec une femme (connue en 1937... jusqu'en 1979, à la mort de celle-ci) et entre la première à l'académie française; Woolf, femme torturée et touchante, investie comme son mari dans la publication des auteurs en qui ils croyaient, et qui se suicide avec des cailloux dans les poches, en s'enfonçant dans l'eau...

Oui, elles me fascinent et j'ai envie de les relire, quitte à lutter contre ma petite intelligence, parce qu'elles le méritent tant, et que je n'aurai jamais fait le tour de leurs mondes...

"Le véritable lieu de naissance est celui où l'on a porté pour la première fois un coup d'oeil intelligent sur soi-même : mes premières patries ont été les livres." Marguerite Yourcenar, Mémoires d'Hadrien

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