"ÉDUCATION La formation dispensée dans les IUFM
est jugée insuffisante et inadaptée, selon un sondage conduit par le ministère. Par Marie-Estelle Pech, Le Figaro
31 mai 2006, (Rubrique France)
Les IUFM n'ont
décidément plus la cote. Les trois quarts des enseignants aujourd'hui en poste
jugent leur formation en Instituts universitaires de formation des maîtres
«insuffisante» ou «très insuffisante». Tel est le constat sans
appel dressé par une récente étude de la Direction de l'évaluation et de la
prospective (DEP) du ministère de l'Education nationale. Cette enquête, menée en
2005, démontre une fois de plus le décalage entre la pratique des enseignants
une fois sur le terrain et la formation globalement trop théorique qui leur est
dispensée dans les IUFM.
Près de 60% des 1 200 enseignants du
premier degré interrogés dans cette enquête regrettent, notamment, un manque de
«conseils pour gérer les situations difficiles» comme la violence, les
situations de handicap des élèves ou le port du voile. Ils sont 55% à demander
davantage d'échanges avec des enseignants déjà en poste. Une critique implicite
du système des IUFM, où des enseignants pour la plupart agrégés et qui n'ont
parfois jamais enseigné dans le primaire peuvent paradoxalement devenir
spécialistes de la pédagogie ou de la lecture en CP ! Plus d'un tiers des
enseignants considèrent par ailleurs que les stages dans les classes – la partie
la plus pratique de leur formation – ne sont pas assez longs.
L'enquête a également analysé le regard
que les profs portaient sur les matières enseignées dans les IUFM, classées
suivant leur degré d'utilité. Parmi celles-ci, ils ont considéré comme les plus
utiles la conduite de la classe, l'apprentissage de la lecture et les savoirs
disciplinaires. La «maîtrise de la langue française» est jugée comme la
plus importante pour la pratique professionnelle par près d'un enseignant sur
deux.
Mais les professeurs n'ont pas les mêmes
priorités selon le public auquel ils s'adressent. Ceux qui travaillent en zones
d'éducation prioritaire (ZEP) devant des enfants souvent plus en difficulté
qu'ailleurs estiment ainsi que l'apprentissage de la lecture est le module le
plus important, loin devant tous les autres. Et ils sont plus d'un tiers à
estimer indispensable le module de «prise en compte de l'hétérogénéité des
élèves». Au cours de leur carrière, 35% d'entre eux souhaiteraient des
formations spécifiques permettant de les aider à combattre l'illettrisme et à
prévenir la maltraitance : cette dernière formation est jugée très utile par
seulement 10% des enseignants hors ZEP mais par 20% en ZEP.
Enfin, il n'est pas très étonnant que les
petits Français restent bons derniers en langues vivantes lors des évaluations
internationales. Environ 36% de leurs professeurs disent en effet éprouver
beaucoup de difficultés à enseigner cette matière pourtant désormais obligatoire
en primaire. L'informatique pose également beaucoup de problèmes à un tiers des
enseignants. Près de 70% d'entre eux mettent ces difficultés sur le compte d'une
formation initiale insuffisante en informatique et en langues vivantes.
Cette étude conforte les nombreuses
critiques de tous bords dont sont l'objet les IUFM. Le gouvernement a fini par
engager une réforme. Le Haut Conseil de l'éducation devrait faire des
propositions à ce sujet à Gilles de Robien d'ici l'été. Selon un premier
document de travail, la pédagogie différenciée serait encouragée, les
enseignants seraient mieux formés pour repérer les problèmes de santé ou les
signes de maltraitance et des cas réels leur seraient présentés, tels que des
problèmes de violence en classe. Enfin, les stages en classe devraient plus
longs. Une manière de se frotter avec les réalités de leur futur métier."
Et on me demande encore parfois pourquoi je ne suis pas passée par l'IUFM. Anecdote : un professeur de cette institution, à qui l'on demandait comment gérer la violence en cours (une chaise qui traverse la classe, un élève qui se montre agressif, au bord du geste fatal, etc), nous a répondu : "Mais ce n'est pas un problème. Tout peut se résoudre par le dialogue !"
Et il est passé à la suite de son cours, lui qui n'avait pas remis les pieds dans une salle de classe depuis dix ans... C'était en Licence, dans un module pré-IUFM que j'avais choisi.
Je ne suis jamais retournée à ces cours. Ce qui ne m'a pas empêchée d'avoir mon Capes plus tard, d'ailleurs.