Une balle dans le pied
Ci dessous un message tiré de ma liste d'abonnement pour enseignants de lettres, qui devrait en choquer plus d'un, qu'il fût ou non dans le milieu éducatif... Lisez attentivement la réforme prévue...
"Bonsoir,
Ci-dessous le lien vers le PROJET DE DÉCRET modifiant les
décrets n°50-581, 50-582 et 50-583 du 25 mai 1950 relatifs aux obligations de
service du personnel enseignant du second degré et les décrets relatifs à leurs
statuts particuliers.
ftp://ftp2.snepfsu.net/snepfsu/actua/Projet_Decret.pdf "
Voici le message que je viens d'envoyer à ma liste de diffusion :
"En tant que TZR Lettres Modernes, l'an dernier, le Rectorat m'a appelée en
voulant me forcer à enseigner trois matières (lettres, histoire et géographie)
en lycée professionnel...
On me menaçait de "refus de prise de poste avec retrait sur salaire" parce
que j'ai dit que j'allais me renseigner.
Grand bien m'en a pris : le SNES m'a appris que j'étais alors en droit de
refuser, chose que le Rectorat ne nous disait pas (NB : apparemment, cette
année, nous ne pouvons plus refuser...).
Par ailleurs, quand j'ai eu mon interlocutrice une seconde fois au
téléphone, elle est restée sans réponse quand je lui ai dit que l'on parlait
beaucoup de moi, mais pas des élèves : car, si je dois enseigner dans une classe
à examen des matières que je ne maîtrise pas, j'envoie les dits élèves droit
dans le mur.
C'est effectivement dire aussi que nos concours et nos qualifications ne
valent rien. Si n'importe qui peut enseigner n'importe quoi, où va-t-on ? Quelle
sera notre crédibilité ?
En tous les cas, chers collègues titulaires sur postes fixes, j'en conclue
que nous allons tous devenir TZR, à terme...
V., en colère et perplexe
PS : je vais diffuser l'info par tous les moyens, mais comme je ne suis pas
en poste depuis juin 2005 (oui, vous avez bien lu), cela va être difficile de
toucher des collègues..."
Parlez-vous l'esperanto ?
Le Rectorat vient de m'appeler. C'est déjà une bonne chose : j'existe encore en tant que prof. Mais sous certaines conditions...
1) Ils n'étaient pas au courant de mon arrêt maladie. Superbe communication entre les services.
2) C'est la section pour les primo-arrivants qui m'a contactée : j'aurais dû apprendre le français à des élèves étrangers. Bien sûr, j'ai fait ça toute ma vie. Trop facile.
3) Le poste était dans le 92, donc pas sur ma zone de remplacement. Logique.
4) Mais si j'avais fait du FLE (Français Langue Etrangère) "on aurait pu s'arranger"... Dixit.
No more comment, je crois c'est mieux.
Le 1% en trop
Post du vendredi 11 mars 2005 tiré du blog de Philippe Ladame
Au
moment où les profs revendiquent plus de moyens, un rapport de la Cour
des Comptes indique qu’ils sont 32.000 à ne pas enseigner.
Le Monde daté du 12/03/05 fournit quelques précisions.
« L’équivalent de 32 000 professeurs à temps plein se
trouvent sans classe ou sans affectation pédagogique, selon une note
confidentielle de la Cour des comptes révélée, vendredi 11 mars, par Le
Figaro. Réalisé à la demande de Pierre Méhaignerie, président (UMP) de
la commission des finances de l’Assemblée nationale, le document
chiffre à 1,5 milliard d’euros le coût de ces enseignants non
utilisés ».
Selon ce rapport, 32 000 enseignants (sur 665 000
enseignants en équivalent temps plein), c’est à dire près de 5%, sont
"sans classe et sans affectation pédagogique".
Pour l’équivalent de 9 500 postes à temps plein, il
s’agit d’enseignants remplaçants qui ne sont pas utilisés ou seulement
partiellement. Les "titulaires de zone de remplacement" ne peuvent, en
effet, être employés que dans leur discipline et dans une zone
géographique délimitée. En contre-partie du fait qu’ils sont appelés à
effectuer des remplacements de plus ou moins court terme, sur des
affectations plus ou moins proches de leur domicile, ses enseignants se
trouvent, en effet, par moments, rémunérés sans affectation.
9 500 autres équivalents temps plein correspondent à
des décharges de service accordées à des enseignants pour tenir compte
de contraintes spécifiques à leur discipline (1 heure accordée pour la
préparation des laboratoires ou pour de la maintenance informatique,
par exemple).
Mille quatre cents équivalents temps plein sont aussi
dégagés pour les décharges syndicales en application des règles de
représentation des personnels dans la fonction publique et trois mille
cent équivalents temps plein sont affectés à des fonctions
administratives.
6 600 de ces enseignants "sans classe" correspondent à
des décharges ponctuelles, à des missions ou des mises à disposition.
Et 1 900 postes correspondent à des surnombres, c’est-à-dire des
enseignants recrutés alors que, vu l’évolution des effectifs d’élèves,
l’éducation nationale n’avait pas besoin d’eux.
Il faudrait certainement affiner l’analyse, mais, au vu
de ses détails, il est probable que la proportion de gaspillage avéré
ne dépasse guère 1%.
Timbré
Parce-que-je-le-Robien m'a encore fait un courrier. Oh, pas juste pour moi, mais pour les 884.000 enseignants de France et de Navarre. Outre le côté creux et démago de la chose, je me suis immédiatement indignée sur le coût de cette démarche inutile : partons du principe qu'un courrier vaut 0.53€ (entre les DOM-TOM et le prix du papier, même si c'est en tarif économique pour la métropole, on ne doit pas être bien loin de ce tarif-là).
Ce qui nous ferait donc 884.000 x 0.53 = 468.520€ (3.073.289,70 francs, pour se faire une idée).
Et là, évidemment, je me dis que c'est de l'argent vraiment jeté par les fenêtres (comme la fois où Ferry nous avait outrageusement envoyé son "livre" : dans mon souvenir, 1.5 million d'euro...). Le budget de l'EN est réduit à une peau de chagrin tous les ans, mais cela n'empêche pas ce genre d'âneries d'arriver.
A part ça, tout va bien. N'ayez pas peur.
Momifiée
C'est absurde, mais c'est ainsi : la rentrée n'a pas encore eu lieu, et je dois envoyer un arrêt maladie à mon lycée de rattachement. Pas de pré-rentrée, pas de poste non plus pour l'instant. Et les piqûres anticoagulation injectées dans le ventre qui commencent demain. Pas le pied, tout ça.
Heureusement, il y en a beaucoup qui seraient morts.
Mon moulin
Demain, exaltante journée de surveillance de 8h à 17h des épreuves de
mathématiques et de LV1. Wouèèèèh, c'est la fête. Le plus dur,
finalement, c'est de ne pas s'endormir...
Au moins, hier, j'ai pu lire les copies des élèves puisque c'était une
épreuve de français (extrêmement bazardée, à mon sens, et pourtant la
plupart d'entre eux ont râté le coche...), mais là...
En plus,
l'anglais niveau Bac me paraîtra pâlichon (oui, ça fait fille
suffisante, et alors ?).
Bon, j'ai prévu pas mal de lectures personnelles pour ces 19 heures de
surveillance, c'est déjà ça. A ce propos, je vous recommande chaudement
Philosophie magazine (j'ai essayé, j'ai adopté) dont j'avais déjà quelque peu parlé.
TZR, c'est formidable
J'ai eu ce matin un appel de mon établissement de rattachement administratif. J'ai bêtement crû qu'on allait me demander de corriger le Bac français ou de faire passer les oraux. Lasse. Je suis de surveillance, comme une pionne, encore une fois. Total des heures perdues et humiliantes : 19 heures de couloirs ou de salles.
Je suis révoltée cette fois-ci de devoir tomber dans ce système, qui ne semble choquer personne dans ce lycée : j'ai une maîtrise de Lettres, le Capes, des compétences pédagogiques, et je vais surveiller le Bac.
Le jour où l'Education Nationale saura utiliser ses atouts et alléger son système néolithique, je crois que je serai morte et enterrée depuis plusieurs siècles déjà.
Prof, un métier d'avenir
"ÉDUCATION La formation dispensée dans les IUFM
est jugée insuffisante et inadaptée, selon un sondage conduit par le ministère. Par Marie-Estelle Pech, Le Figaro
31 mai 2006, (Rubrique France)
Les IUFM n'ont décidément plus la cote. Les trois quarts des enseignants aujourd'hui en poste jugent leur formation en Instituts universitaires de formation des maîtres «insuffisante» ou «très insuffisante». Tel est le constat sans appel dressé par une récente étude de la Direction de l'évaluation et de la prospective (DEP) du ministère de l'Education nationale. Cette enquête, menée en 2005, démontre une fois de plus le décalage entre la pratique des enseignants une fois sur le terrain et la formation globalement trop théorique qui leur est dispensée dans les IUFM.
Près de 60% des 1 200 enseignants du premier degré interrogés dans cette enquête regrettent, notamment, un manque de «conseils pour gérer les situations difficiles» comme la violence, les situations de handicap des élèves ou le port du voile. Ils sont 55% à demander davantage d'échanges avec des enseignants déjà en poste. Une critique implicite du système des IUFM, où des enseignants pour la plupart agrégés et qui n'ont parfois jamais enseigné dans le primaire peuvent paradoxalement devenir spécialistes de la pédagogie ou de la lecture en CP ! Plus d'un tiers des enseignants considèrent par ailleurs que les stages dans les classes – la partie la plus pratique de leur formation – ne sont pas assez longs.
L'enquête a également analysé le regard que les profs portaient sur les matières enseignées dans les IUFM, classées suivant leur degré d'utilité. Parmi celles-ci, ils ont considéré comme les plus utiles la conduite de la classe, l'apprentissage de la lecture et les savoirs disciplinaires. La «maîtrise de la langue française» est jugée comme la plus importante pour la pratique professionnelle par près d'un enseignant sur deux.
Mais les professeurs n'ont pas les mêmes priorités selon le public auquel ils s'adressent. Ceux qui travaillent en zones d'éducation prioritaire (ZEP) devant des enfants souvent plus en difficulté qu'ailleurs estiment ainsi que l'apprentissage de la lecture est le module le plus important, loin devant tous les autres. Et ils sont plus d'un tiers à estimer indispensable le module de «prise en compte de l'hétérogénéité des élèves». Au cours de leur carrière, 35% d'entre eux souhaiteraient des formations spécifiques permettant de les aider à combattre l'illettrisme et à prévenir la maltraitance : cette dernière formation est jugée très utile par seulement 10% des enseignants hors ZEP mais par 20% en ZEP.
Enfin, il n'est pas très étonnant que les petits Français restent bons derniers en langues vivantes lors des évaluations internationales. Environ 36% de leurs professeurs disent en effet éprouver beaucoup de difficultés à enseigner cette matière pourtant désormais obligatoire en primaire. L'informatique pose également beaucoup de problèmes à un tiers des enseignants. Près de 70% d'entre eux mettent ces difficultés sur le compte d'une formation initiale insuffisante en informatique et en langues vivantes.
Cette étude conforte les nombreuses critiques de tous bords dont sont l'objet les IUFM. Le gouvernement a fini par engager une réforme. Le Haut Conseil de l'éducation devrait faire des propositions à ce sujet à Gilles de Robien d'ici l'été. Selon un premier document de travail, la pédagogie différenciée serait encouragée, les enseignants seraient mieux formés pour repérer les problèmes de santé ou les signes de maltraitance et des cas réels leur seraient présentés, tels que des problèmes de violence en classe. Enfin, les stages en classe devraient plus longs. Une manière de se frotter avec les réalités de leur futur métier."
Et on me demande encore parfois pourquoi je ne suis pas passée par l'IUFM. Anecdote : un professeur de cette institution, à qui l'on demandait comment gérer la violence en cours (une chaise qui traverse la classe, un élève qui se montre agressif, au bord du geste fatal, etc), nous a répondu : "Mais ce n'est pas un problème. Tout peut se résoudre par le dialogue !"
Et il est passé à la suite de son cours, lui qui n'avait pas remis les pieds dans une salle de classe depuis dix ans... C'était en Licence, dans un module pré-IUFM que j'avais choisi.
Je ne suis jamais retournée à ces cours. Ce qui ne m'a pas empêchée d'avoir mon Capes plus tard, d'ailleurs.